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Opinion

Nous étions sept

Isabelle Guisan, Journaliste - ven. 01/03/2024 - 11:38
Corps et âme, la chronique d'Isabelle Guisan.
réunion débat bénévolat cours
Les cours de français pour étrangers s'élargissent souvent à des débats de société. © iStock

Quel bienfait de reprendre ce qu’on appelle du bénévolat! En l’occurrence des moments de conversation française avec des jeunes gens venus d’ailleurs. Continents, cultures, trajectoires de vie se rencontrent, s’entrechoquent, se surprennent, souvent se comprennent. Nous cherchons ensemble à communiquer en français. Parfois, quand la confiance émerge, nous dialoguons sur des aspects essentiels de l’existence. 

Depuis le début de 2024, j’amène quelques spécificités de notre région du monde. De l'arbalète et la pomme de Guillaume Tell à la votation sur la 13e rente AVS. J’ai un blanc sur le nom du bailli Gessler, je m’embrouille autour des pourcentages employé-employeur, mais internet m’aide et l’essentiel y est.

En dix ans, le contexte a changé. D’abord, il fallait donner de la voix dans la cuisine animée de Point d’Appui, le sous-sol précaire dont disposaient les Églises vaudoises à Lausanne. Puis rassembler des sièges épars dans l'ancien garage qui hébergeait le collectif Saint-Martin au centre-ville. Jusqu'à trente personnes juchées sur des chaises branlantes et des bouts de table. Candidats à l'asile, réfugiés, sans-papiers. Mais aussi épouses d'expats chinois ou européens de l'Est.

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Le réfugié déplorait une seule chose, avec humour: le stress”

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Isabelle Guisan

Maintenant, j'ai la clé d'une petite salle dans une maison de quartier. Nous sommes entre quatre et huit assis autour d'une tasse de thé. Le cadre s’est calmé, mais toujours la même aventure humaine, avec un article occasionnel que nous lisons ensemble et les discussions que nous offre le moment présent. 

La dernière fois, nous étions sept. Un quotidien venait de donner la parole à un réfugié content de son sort en Suisse, satisfait de son travail. Il déplorait une seule chose, avec humour: le stress. Lui stresse même le dimanche sans rien faire, simplement parce qu’en Suisse on stresse tout le temps. 

Les épouses d’expats n’ont d'abord pas repéré de stress dans leur existence actuelle. Puis un réfugié a décortiqué, en souriant, l’attente interminable de papiers, les aberrations administratives. Les épouses ont écouté, réfléchi, pensé à leurs enfants à l'école et la discussion s'est élargie.

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